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                         Vos questions / nos réponses  
                        Réponses de Jean Caston, Chercheur en neurobiologie à l’Université
                                de Rouen. 
                        Question : quelles sont, en pathologie mentale, les méthodes
                            utilisées pour déterminer des modèles animaux ? 
                            Réponse : En intervenant sur la mère gestante,
                            on tente de perturber le développement du système nerveux du foetus. C'est
                            ainsi que l’on peut administrer, à des rates gestantes, de l'acide valproïque
                            (qui détermine des anomalies des noyaux des nerfs crâniens et du cervelet chez
                            les foetus), des oestrogènes de synthèse (qui perturbent, chez la descendance,
                            les fonctions cognitives et émotionnelles). On peut aussi soumettre des rates
                            gestantes à des agents stressants qui vont entraîner, chez la descendance, un
                            hyperfonctionnement de l'axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien et une plus grande
                            probabilité de développer des pathologies dépressives. Il faut
                            conserver à l'esprit que l'on travaille en aveugle, ce qui signifie que lorsqu'on
                            soumet une rate gestante a un agent délétère pour le foetus, on ignore
                            quel sera son effet exact chez le foetus. La méthode consiste donc à étudier
                            le comportement de la descendance (fonctions cognitives et émotionnelles,
                            comportement attentionnel, comportement social, etc...), puis, ceci fait, à sacrifier
                            les animaux et à étudier leur système nerveux par des techniques
                            appropriées de façon à rechercher des anomalies éventuelles,
                            fonctionnelles ou anatomiques, puis a corréler les données neurobiologiques et
                            comportementales recueillies. 
                        Question : Quelle peut être l’influence de la
                            progestérone prescrite à 5 mois de grossesse ? 
                            Réponse : Je ne sais pas. Mais, en tout état
                            de cause, tout facteur physique, chimique ou psychologique qui affecte une femme en cours de
                            grossesse est un facteur de risque pour le foetus et, en particulier, pour son système
                            nerveux qui est en cours de développement. 
                        Question : Peut-on transférer à l’homme
                            les résultats constatés chez l’animal ? 
                            Réponse : Raisonnablement oui, tout en restant
                            prudent, nécessairement. Les grandes étapes du développement ne sont
                            pas vraiment différentes chez le rat et chez l'Homme. Toutefois, le développement
                            ne se fait pas à la même vitesse chez des espèces différentes et
                            un raton à la naissance n'est pas dans le même état de maturité
                            qu'un bébé né à terme. Il en est de même à
                            mi-gestation. Cela veut dire qu'un agent délétère qui agirait sur une
                            rate gestante au 14ème jour de gestation (la durée de la gestation chez le rat
                            est de 28 jours) et ce même facteur qui agirait sur une femme à 4 mois et demi
                            de grossesse, n'aurait sans doute pas les mêmes conséquences sur les ratons et
                            sur le bébé. 
                        Question : Y-a-t’il une différence de formule
                            chimique entre le distilbène et l’éthinyl-oestradiol ? 
                            Réponse : Le distilbène (diéthylstilbestrol)
                            et l'éthinylestradiol n'ont aucune parenté chimique. Mais tous deux sont des
                            hormones synthétiques ayant des propriétés oestrogéniques. L'éthinylestradiol
                            est un stéroide (comme les hormones oestrogènes, les hormones androgènes
                            et les hormones cortico-surrénaliennes). Le distilbène est un œstrogène
                            non stéroide. Les produits de dégradation dans l’organisme de ces deux
                            oestrogènes artificiels (toxiques) sont différents de ceux des oestrogènes
                            naturels. Ces produits ont été souvent administrés en « cocktails
                            » ajoutés à la progestérone, naturelle ou artificielle
                            (hydroxyprogestérone). 
                        Question : On parle souvent de troubles psy apparus à
                            l’adolescence, mon fils a eu des manifestations dès l’enfance avec
                            aggravation vers 20 ans. 
                            Réponse : L'âge auquel les troubles
                            apparaissent dépend de nombreux facteurs: les doses qui ont été injectées
                            à la mère, la durée du traitement, le moment de la grossesse auquel le
                            traitement a eu lieu. Mais il faut garder à l'esprit que le traitement aux oestrogènes
                            de synthèse induit des fragilisations qui vont ou non se révéler, précocément
                            ou plus tardivement en fonction d'influences diverses de nature biologique ou
                            environnementale. Il est vrai que la puberté est un moment fragile de la vie, tant
                            sur le plan biologique (neuro-endocrinien) que sur le plan psychologique. Au cours de cette
                            période fragile peut se révéler une pathologie latente. Il est clair
                            que les pathologies dites mentales, qui sont « multifactorielles »,
                            n'apparaissent pas n'importe quand et que l'anorexie par exemple, apparaît souvent au
                            moment de la puberté, chez la fille en particulier, la dépression généralement
                            plus tardivement, la schizophrénie à la fin de l'adolescence ou chez le jeune
                            adulte etc... 
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